Et bien sûr un joyeux Noël

Bien sûr, il est trop tard pour vous souhaiter un joyeux Noël, ô lecteurs chéris, car un joyeux Noël se souhaite avant la Noël. Mais qu'importe! Ça ne vous a pas empêché de profiter du réveillon offert par Dorothée à la télévision, sur AB1. Ceux qui étaient un peu inquiets en voyant (et en entendant, surtout) Dorothée dans Vivement dimanche en novembre ont sans doute été rassurés: Dorothée est toujours aussi jeune et belle, et les robes jaunes à petits pois noirs lui vont toujours bien, mais moins avec un gilet vert qui jurerait sur tout le monde...


Pour ceux qui auraient préféré une fête de famille, la dinde et les marrons à AB1, ce Dorothée Show racontait l'histoire, ou plutôt la destinée de Dorothée et ses copains d'enfance, Emmanuelle, Lio, Jacky et la si connue Valli, qui dès la crèche et encore en couches-culottes, rêvent de gloire, d'argent et de filles faciles. Tellement que, après avoir vu Johnny Hallyday à la télé, elles décident de former un groupe de rock de filles. Malheureusement, le destin est mal fait et chacun part suivre un tout autre chemin que celui de la musique et Dorothée reste seule avec le gros Carlos, avec pour seule ambition de s'incruster à la télé, où il n'est pas si facile d'entrer quand on ne s'appelle les Gypsy Kings ou Dick Rivers...

Il est temps de noter que c'est bien beau de vouloir faire un grand show de Noël, mais que les moyens de AB1 sont hautement limités, et que les invités n'ont pas tous le même prestige. Jean-Luc Azoulay invite Michel Denisot pour le traiter de moche sur fond de Hep Monsieur (extrait de l'album 87 de la miss, dont quatre morceaux sont extraits, parmi lesquels le tubesque Docteur), fait chanter (relativement mal) Jean-Pierre Foucault sur Pour faire une émission, sait utiliser le potentiel frapadingue de Frédéric Mitterrand, convainct Isabelle Morizet de rejouer son rôle de Karen Chéryl et distille quelques clins d'œil à la télé d'avant en faisant apparaître ici ou là Michel Cardoze, Léon Zitrone, Alain Decaux et quelques speakerines qu'on n'avait plus vus depuis longtemps. Mais à côté de ça, il semble s'imposer la présence des Léopold Nord et Vous ou de David Hallyday (who sings in English, like in the eighties), qu'il n'essaie même pas d'intégrer convenablement à son histoire.

Car Jean-Luc Azoulay, s'il a montré tout son talent pour écrire des scénarios de vingt-cinq minutes, peine pour tenir une heure et demie. D'abord, il comble trop souvent avec des chansons de Carlos. Ensuite, il cède un peu à la facilité scénaristique... Si l'on excepte l'idée de départ, qui repose sur un mensonge (car oui, Dorothée a environ dix ans de plus que ses "copines d'enfance", ce qui implique qu'elle a beaucoup dû redoubler à la crèche), est-il vraiment crédible que Karen Chéryl fasse des mini-concerts avec ses danseurs dans sa loge, en chantant À l'envers, à l'endroit? Pourquoi Dorothée se met-elle à chanter Che sera dans le coin costumes de la télévision? Quant au final, sur Ça donne envie de chanter, l'hymne des mercredis de folie du Club Dorothée, il n'est rien d'autre qu'un copié-collé, en moins bien, de celui du Dorothée Show 83, diffusé sur Antenne 2, il y a vingt-quatre ans. On pourra aussi regretter un manque de moyens flagrant: AB1 n'est pas TF1 et on se croirait revenu vingt ans en arrière quand des oiseaux animés s'entêtent à dire coucou à la caméra...

Heureusement, tout ça est compensé, un peu, par une Dorothée qui s'amuse, en duotant Dactylo rock (avec Dick) ou Diamonds are a girl's best friends (avec Karen et un accent anglais digne d'Alizée). Même, du haut de sa longue carrière de vingt ans à la télévision, Dorothée accepte encore les délires de son scénariste-producteur: quand elle saute dans les bras de Christian Morin pour chanter un extrait de l'opérette La Mascotte, la dinde de Noël, c'est elle!