Histoire secrète n°3 : Si le BHV ferme, c'est un peu à cause de moi

Je suis un collectionneur bête et maniaque. C'est-à-dire, mais c'est bien naturel, que j'aime que mes étagères présentent un spectacle uniforme à mes yeux. Je supporte par exemple assez mal que des séries comme Boule & Bill aient choisi de changer de maison d'édition en cours de vie, passant de Dupuis à Dargaud, mais surtout d'albums dont le dos se lit en penchant la tête vers la droite à des albums un peu plus petits mais un peu plus larges, dont le dos se lit en penchant la tête vers la gauche... C'est là un problème malheureusement insoluble, et il ne me reste qu'à redoubler d'ingéniosité pour ranger habilement ma bibliothèque en épargnant les muscles de mon cou, tout en tentant de mettre toute la production de Roba au même endroit, ce qui est finalement plus simple que pour celle de Peyo, tandis que celle de Franquin a l'avantage d'être assez importante pour prendre une étagère à elle seule.

Cette manie de vouloir l'uniformité cause également quelques problèmes avec mes vidéos disneyennes. L'éditeur décide d'ajouter un petit bandeau doré en 1997 avec écrit dedans Les Grands Classiques, il n'en faut pas plus pour que je manifeste l'envie de posséder, car je suis profondément matérialiste, chacune des vidéos que j'ai déjà avec cette nouvelle jaquette. Ma mère, qui est profondément réaliste, savait dire non. Curieusement, d'ailleurs, je n'ai émis aucun désir similaire à la sortie de la numérotation, que je ne suis même pas dans mon rangement, et tant pis si je passe du 38 au 41, puis au 43, au 45, au 48, au 52, reléguant bien plus loin tous les numéros intermédiaires qui ne sont même pas des films de Noël, voire, pire encore, des Vidéo Première qui ne peuvent décemment pas être mélangés. Quant à ce nouveau choix de mise en page des jaquettes de dévédés, il crée un problème similaire aux changements de maquette des Boule & Bill. C'est pourri, mais c'est tant pis.

Finalement, je sais très bien retenir mes pulsions et, mis à part mes supports dorothéens (qui, entre cassettes, 33 tours ou cédés, comptent un certain nombre de redites), je peux affirmer avoir très peu de choses en double dans mes affaires. Ou peu, en tout cas...
Seulement, à l'occasion de la fin de XIII, la «série-culte qui rapporte plein d'argent», il a fallu que Dargaud ressorte toute la série en dotant chaque album d'un fourreau. Un fourreau avec des illustrations plus ou moins jolies (voire moches, ça reste du Vance), mais qui, trop la classe, forment un dessin quand on les met côte à côte dans la bibliothèque. Un truc absolument indispensable, donc, et l'occasion idéale d'enfin acheter ces albums que je n'avais pas dans leur très grande majorité. Quant aux autres, ceux que j'avais déjà, les premiers et les derniers, il m'a fallu oser bafouer mes principes. Et j'ai donc dû, pour assouvir mes besoins, truander le BHV en achetant ces albums, puis en les ramenant le lendemain en prétendant les avoir déjà... en gardant, honteux, les fameux fourreaux chez moi.

Et ce qui devait arriver arriva, le BHV en question ferme ses portes demain, lui qui se vide lentement de son contenu depuis quelques mois au point d'en devenir déprimant et pour être remplacé par un Castorama, c'est affreux et bien moins glamour, et il y a bien peu de chances qu'on puisse y trouver un coin fauteuils pour y lire les livres en vente plutôt que les acheter... Quand bien même j'en serai (très partiellement) responsable, cette fermeture me peine un peu. Mais si jamais vous aviez les fourreaux 1, 3, 17 et 19 de la série XIII qui vous encombrent, je suis sûr que ça me permettrait de me sentir tellement moins coupable. Si, si...