Dégénération

Aujourd'hui, pendant ma séance de cinéma, j'ai bien failli m'endormir, ce qui est bien la preuve que j'ai des journées fatigantes. Il s'en est fallu de peu que ma sieste d'hier ne soit que le prélude de ma vraie nuit, ce qui m'aurait privé des Corbeaux sur TF1, mais m'aurait peut-être évité de tourner un peu en rond avant de me rendormir, vers minuit. Je ne veux pas jeter la pierre sur toute une génération et accuser mes élèves qui sont pourtant de charmants bambins, probablement, mais je crois malgré tout qu'ils ont une part de responsabilité dans cet état de fait. Ils bavardent, ça fait du bruit, c'est fatigant.

Je ne plains pas plus que ça, oh non! Ils pourraient remplacer les innombrables boulettes de papier qu'ils se lancent visiblement (ce dont je ne me rends compte qu'une fois le cours fini, en constatant que ma salle est un vrai dépotoir) par des compas ou des chaises, comme celle qui vient de sauter du premier étage pour atterrir dans le hall du collège. Mais non, ils ne font que parler. Sauf qu'il faut bien agir, parfois.

C'est un peu délicat de virer les élèves pénibles, quand on sait ce que la vie scolaire endure déjà en cette période de haute tension, mais il reste les carnets. Mon côté paradoxal fait que je ne m'acharne même plus sur C, qui de toute façon n'en a rien à battre puisqu'il n'a absolument jamais rien fait ou alors c'est toujours lui évidemment, ni sur R, le fils de la gardienne qui est un parleur pathologique (et qui va bien trop souvent chercher C malgré leurs deux tables de séparation, alors qu'il s'est franchement calmé), alors que je trouve absolument aberrant d'établir une échelle de sanctions différentes en fonction du passif des élèves (consistant à dire, comme notre chère chef, que les élèves qui ont fait des efforts ne méritent pas d'avertissements de travail ou de conduite même s'ils sont loin d'être des anges). De toute façon, c'est tellement la merde avec mes cinquièmes, que je tombe forcément à côté et c'est vrai que j'aurai dû sanctionner O, aujourd'hui, par exemple...

En sixième, je suis bien plus attentif à tout, puisque c'est ma classe, celle qui fait que mes collègues m'accueillent en salle des profs en me disant qu'ils sont insupportables (ce qui n'est finalement pas faux, même si c'était sans doute très drôle, ce faux pet de lundi après-midi...). En cas de force majeure, je pratique une razzia de carnets, sans même tenter le jeu du «il n'y a que celui en haut de la pile qui est puni». C'est ainsi qu'il m'a fallu écrire, vendredi dernier, «L. bavarde» dans le carnet de L.

Vous noterez que j'ai choisi de faire fort court, face à la dizaine de carnets dans lesquels écrire, sans donc préciser que la situation se déroulait dans mon cours, ce qui semblait un peu évident, je pense (ou alors pas du tout, peut-être me trompé-je?). Je sais qu'un mot dans un carnet, c'est un peu nul, qu'il faudrait passer un peu aux heures de retenue voire aux punitions écrites, mais pas quand les parents suivent à la maison! Non seulement les parents de L. ont signé mon mot, mais ils m'ont même répondu, ce qui est loin d'être fréquent!

Heureusement, car L. n'est pas encore muette!
Connard!

Commentaires

Anonyme a dit…
Je crois que j'aurais adoré t'avoir comme professeur. Non pas du fait de ta compétence, ton jeune âge ou l'humour dont tu dois - je n'en doute pas - parfois faire preuve en plein cours, mais bien pour ce genre de commentaires, comme celui que tu as fait sur le carnet de L.
Ma maman aussi m'a toujours défendu bec et ongles lorsque mes professeurs m'offensaient. Et je dois bien avouer qu'elle a toujours eu raison tant les (rares mais violents) mots qui y ont été inscrits n'étaient que pure jalousie et totale injustice de la part de mes professeurs.
De cette dégénération, je compatis donc pour toi, parce que toi, je te connais, mais je ne compatis certainement pas pour la grande majorité de tes confrères et consœurs.
Pierre a dit…
Il faudra quand même que tu m'expliques en quoi un mot comme «L. bavarde» te suffit pour déclarer que tu aurais adoré m'avoir comme prof. Néanmoins, je te remercie pour ton soutien, que je ne transmettrai donc pas à mes collègues.
Anonyme a dit…
je suis juste hallucinée par cette réponse !
et rhum raisin, je comprends pas du tout les parents qui "défendent" leurs gosses devant l'autorité des prof... qu'ils aillent manifester leur mécontentement devant le prof directement mais sans le montrer à leur gamin me parait quand même plus censé...
enfin j'espère que ça ne va pas en resté là pierre, tiens nous au courant !
j'hallucine totale !! (je l'ai déjà dis, non ?)
et pourtant j'aime pas les profs !! (sauf pierre ;))
Anonyme a dit…
Pierre, c'est juste qu'écrire "L. bavarde", ce n'est pas très méchant, voire même rigolo. Alors que les mots qui ont été inscrits dans mon carnet à moi au collège - et ici commence ma réponse au commentaire de cecilette - et qui ont été écrits par deux profs particulièrement détestables à deux périodes différentes, étaient déplacés et réellement injustes envers moi. Si maman m'a défendu, dans ces deux cas précis, c'est parce que c'était inenvisageable autrement. Elle est d'ailleurs allée manifester son mécontentement auprès des dits professeurs, ce qui a porté ses fruits, au moins pour l'un des deux.
En revanche, je suis d'accord sur le fait que les parents ne devraient pas trop défendre leurs enfants devant les profs, surtout quand l'offense n'est que d'écrire "L. bavarde".
Anonyme a dit…
Et oui mon pauvre Pierre, ce qui est triste aujourd'hui c'est que la réponse cinglante des parents est devenue la norme. De toute façon si L. encourt un avertissement au conseil, ou même une remarque négative sur le bulletin, mieux vaut écrire ce mot car en cas contraire les mêmes parents risquent de te reprocher de ne pas les avoir informés des bavardages de L. Mais c'est vrai que tu as été un peu violent. Je te conseille pour la prochaine fois : "L. bavarde, mais L. reste un enfant formidable et je lui conserve toute mon affection". Envisages-tu une réponse afin d'entamer un échange épistolaire avec cette famille pleine d'humour ?
Pierre a dit…
Monty, je te remercie grandement, je penserais à ta formulation en écrivant un mot la prochaine fois que L. bavardera. J'ai songé un instant répondre spirituellement, après avoir réussi à refermer ma bouche et demandé à L. si c'était censé me faire rire, mais finalement, j'ai été faible et j'ai joué mon cafteur. Le mot a donc fait le tour du collège et Monsieur et Madame ont été conviés au collège ce matin, pour rencontrer la CPE et la principale (mais pas moi, parce que je ne travaille pas).
Anonyme a dit…
C'était la meilleure solution, tu as une équipe efficace, quelle chance ! L'échange de traits spirituels aurait pu continuer longtemps, mieux vaut montrer que ça ne fait rire personne.

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