Que du vent...

Il ne faut jurer de rien. Par exemple, il y a quelques jours, je disais ici que chacun des Jurassic Park était un film au top dans sa catégorie. Le deuxième opus prenait naturellemnt la place de leader dans le créneau (pas très concurrentiel) du film avec un monstre qui détruit une ville, bien loin devant le navrant Godzilla de Roland Emmerich, par exemple. J'aurais pu jurer ne jamais changer d'avis, parce que Jurassic Park, c'est Jurassic Park et que Spielberg, c'est Spielberg... Et pourtant, au bout d'une demi-heure, je me suis vaguement demandé si Cloverfield n'était pas le meilleur film de monstre qui détruit une ville que j'avais eu l'occasion de voir...

Au bout d'une petite heure et demie (comprenant dix grosses minutes d'un générique fin inutile et sans rien de compréhensible après qui vaille la peine de les subir, à l'exception de l'excellente musique pleine de chpoum et de aaah), je me suis demandé si Cloverfield était vraiment un film de monstre qui détruit une ville... Parce que, à l'image des Dents de la mer, on ne voit rien du monstre ou si peu pendant l'essentiel du film, et il vaut mieux parce qu'il est un peu décevant finalement (après un long moment passé à se demander si on le verra, finalement, ce monstre, ou si non, vraiment, c'est trop demandé). En poussant l'hommage aux Dents de la mer jusqu'au bout, le réalisateur Matt Reeves a choisi de tout filmer caméra à l'épaule, ce qui n'est pas sans filer un peu la gerbe par moments, et notamment au début, parce qu'il faut le temps de s'habituer. Mais le procédé, pas inédit, est parfaitement exploité ici: tout Cloverfield n'est rien d'autre qu'une et une seule vidéo-témoignage de l'attaque.

Parmi les points positifs, une longue scène d'intro (une demi-heure environ), idéale justement pour s'habituer en douceur aux mouvements de caméra et presque oublier qu'on vient voir un film de monstre (si c'en est bien un). Le but de Cloverfield est visiblement de créer un attachement aux personnages, quatre pendant l'essentiel du film dont un qu'on ne voit presque pas puisqu'il tient la caméra, qui décident de se jeter dans la gueule de la Bêêête juste parce que le héros (Michael Stahl-David, visuellement très sympathique, quoiqu'en dise son ingrate de fiancée dans l'ouverture du film) ne peut pas laisser mourir la fille qu'il aime dans son appart et que les amis du héros ne peuvent pas le laisser se jeter seul dans la gueule de la Bêêête. Eh oui, Cloverfield est une bien belle histoire d'amour impossible, de couple qui se déchire, de pure dévotion, mais aussi d'amour fort, d'amour toujours, celui qui permet de courir un sprint dans la rue juste après avoir été bêtement empalée.

Car, pour tenir le rythme, Cloverfield triche un peu avec la réalité (hormis le coup du monstre qui détruit la ville, évidemment). Certaines coupes de la caméra (qui permettent de découvrir le contenu original de la cassette -car il s'agit d'un caméscope à casssettes, top moderne!- et de s'immiscer dans le couple maudit au centre de l'intrigue) ne sont ainsi absolument pas justifiées, même si on peut comprendre que regarder trois pelés grimper 54 étages nuise à l'intérêt du spectateur (intérêt qui sera de toute façon relancé de manière tout à fait artificielle un peu plus tard). Et surtout, Cloverfield prouve le génie du producteur JJ Abrams.

Parce que Cloverfield n'explique finalement rien du tout. En suivant un seul point de vue pendant tout le film, le spectateur ne sait rien de plus que les protagonistes, qui eux-mêmes ne savent pas grand-chose, même en regardant la télé ou en interviewant les militaires. Le film économise toute révélation, toute justification, et donc toute déception, par la manière même dont il est réalisé. Pour résumer, JJ Abrams a construit un buzz viral monumental à coups de bandes-annonces mystérieuses qui ne débouche sur rien (et qui devrait commencer à faire paniquer les fans de Lost, les disparus)! Mieux encore, il s'est offert une licence déclinable autant de fois qu'il le voudra, en changeant juste celui qui immortalise la destruction de Manhattan, sans même changer le lieu, ni même les effets spéciaux.

Et il n'y aurait pas de raison que ça ne marche pas plus que ce premier volet. Parce que même si c'est un film finalement creux qui n'évite pas les situations déjà vues, Cloverfield est aussi une (petite) heure et demie qui passe sans qu'on s'en rende compte. Un film ultra-sympathique et efficace, sans doute le summum du film pop-corn.

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