Extrême limite


À la lecture rapide du pitch de Ma sœur et moi, dans lequel Grégori Baquet se déguise en femme, on pouvait craindre le pire, ou le meilleur si on est du genre à se moquer, surtout en sachant que c'était une production Dechavanne destinée à TF1. Déjà, force est de constater que le scénario laissait passer quelques improbabilités, car comment une femme dans le coma depuis huit ans pouvait-elle savoir que l'Abbé Pierre était mort, à moins qu'on lui ait dit entre le moment où elle s'est réveillée et le moment où elle l'a affirmé (pourquoi pas), ou bien que son coma lui ait fait oublier que ce vieux monsieur a mis beaucoup de temps avant de mourir au point qu'elle l'ait cru mort?

On pourrait aussi et surtout être embêté parce que personne ne reconnaît Julien ni même ne tique sous son costume de Lucie, comme si son travestissement était une sorte d'identité secrète du même niveau que Sailor Moon... mais il est vrai que sa sœur est réellement assez peu belle, en tout cas assez peu féminine, comme en atteste une photo d'elle sur la plage en Patagonie que Julien a étrangement conservé et qui lui sert pour sa métamorphose, ainsi que la venue de la fameuse sœur juste à la fin, qui permet de constater que, oui, la ressemblance est terriblement saisissante, mais qu'elle a bien fait de se laisser pousser les cheveux, et de les teindre...


Ma sœur est moi - Extrait

On pouvait craindre aussi le pire niveau humour, par exemple quand Bernadette Laffont, excellente en mère odieuse, retrouve sa fille (enfin, son fils travesti) pour la première fois depuis son réveil, en lui trouvant quelque chose «en plus» (ah ah trop drôle, une blague vaseuse sur la bite vous dites-vous), avant qu'elle ajoute «qui pétille!», et là, forcément, vous avez juste un esprit mal placé inadapté face à un humour trop fin (ou alors, «ça» n'a pas les mêmes fonctions chez Grégori Baquet que chez moi, à moins que ce soit chez moi qu'il y ait un problème, c'est finalement un domaine que je ne maîtrise pas à la perfection).

Il faut se rendre à l'évidence, pourtant: Ma sœur est moi était une fiction de qualité destinée à tous ceux qui aiment chanter en prenant leur balai à chiottes en guise de micro, c'est-à-dire tout le monde...


D'abord parce que Grégori Baquet commence à accuser physiquement sa trentaine (ce qui est logique, à trente-huit ans) et joue désormais (toujours un peu mal) des rôles bien plus matures. En l'occurrence, il a même carrément une fille en troisième! Sauf qu'il ne sait rien de sa vie, parce qu'il est un grand rêveur et, tel Ally McBeal, il se met à danser en pleine réunion ou s'imagine envoyer des ventouses à la gueule des gens. Car Julien a un bien gros problème: son métier de concepteur de lunettes de toilette, même dans les modèles phosphorescents ou parfumés, ça le fait chier. Il n'a fait ça que parce que sa sœur s'est barrée, c'est même pour ça que sa mère est tombée dans le coma.

Mais en se travestissant, uniquement pour empêcher sa mère de retomber dans le coma en constatant que le mur de Berlin est tombé que sa fille chérie est partie (et pas du tout par perversion, hein), tout s'arrange, parce que tout le monde aime sa sœur: elle s'intègre parfaitement dans cette entreprise où il ne connaissait personne, elle communique avec sa fille dont il ne connaissait rien de la vie et même pas qu'elle allait partir à Londres avec sa mère, et même, il séduit l'infirmière pour qui, heureusement ce n'est pas réciproque parce que, ouf, elle n'est pas lesbienne, ce qui lui permet de sortir avec lui, à la fin, une fois que tout est découvert au détour d'une allergie aux cacahuètes, de même qu'il se fait accepter par ses employés, ainsi que par sa fille.

Et, quand il sauve l'entreprise familiale grâce à une lunette ultra-hype dont il a eu l'idée en pensant à sa fille, on comprend le vrai propos du téléfilm et son message: «les lunettes de toilette mp3 résolvent tous les problèmes».
Une belle leçon de vie, ma foi.

Commentaires

Anonyme a dit…
Merveilleux téléfilm en effet ! Il a tenu toutes ses promesses. Je suis très étonné que tu ne saches pas que ça pétille cependant. Quant à Grégory,malgré ses 38 ans, tu as tout de même sélectionné le seul extrait où on le voit en slip (pour éclaircir le mystère de l'effervescence intra slipesque ?)
Pierre a dit…
Tu oublies la scène où il se bat avec son avatar féminin, et où il est sans doute en slip dans son bain (quant à ses 38 ans, c'est un détail). Mais j'avais choisi cet extrait pour la merveilleuse photo terriblement authentique de la sœur moche devant la plage déserte, qui fait partie de ce qui m'a le plus fait rire dans le téléfilm. Et as-tu vu quand le frère et la sœur se serrent la main, avec pleins d'effets spéciaux, mais que le frère de dos est clairement une doublure dont la perruque ne correspond pas à la coiffure de Grégori Baquet?

Et vraiment non, ça ne pétille pas chez moi.
Anonyme a dit…
Dommage, le pétillement ça fait plus festif. J'avoue qu'au moment où la soeur, la vraie, a reparu, je n'étais plus guère concentré. Mais j'ai apprécié les effets spéciaux de la bataille dans le bain. Et évidemment j'ai pensé au fait que cela avait contraint Grégory à prendre un bain avec sa doublure qu'on voit de dos. J'ai raté la photo du début, j'étais encore avec Cyril Lignac à ce moment.
Rhum Raisin a dit…
Cette fiction de qualité m'a torturé pendant cinq bonnes minutes. Au bout de ces cinq bonnes minutes de torture, j'ai décelé des mots subliminaux à l'intérieur des dialogues du téléfilm. Un moment, le médecin qui s'occupe de la mère de Julien et de Lucie a dit à Julien : "Je sais, c'est pas le remède à tout, mais faut se forcer parfois". Ces mots ont résonné dans ma tête, jusqu'au moment où j'ai reconnu les paroles de Lucie de Pascal O. cachées dans un téléfilm où Lucie est le prénom de l'héroïne. Rien que pour ça, j'ai trouvé cette fiction de qualité.
Pierre a dit…
RR, j'avoue que je suis un peu vert de ne pas avoir vu ça. Peut-être que TF1 voulait se rattraper de ne pas l'avoir fait sur L'amour aller retour (enfin, je crois que ça s'appelait comme ça).

Posts les plus consultés de ce blog

Lilly-Fleur Pointeaux nue (n'est pas dans ce billet)

À lit ouvert

The boys from Ipanema