L'invitation au voyage

La semaine dernière, j'étais à Mulhouse. On pourrait penser que ça vire à l'obsessionnel, ce besoin d'en parler encore et encore, comme si c'était à ce point une épreuve de vie traumatisante. Bien au contraire: Mulhouse est le lieu d'une première mondiale dans ma vie, malgré mes déjà 34 ans. En effet, à 34 ans, il n'y a guère qu'une carte Week-end qui permette d'avoir des tarifs réduits quand on voyage en train et, conséquence d'un raisonnement qui rallongerait inutilement cette introduction, il me fallait passer trois jours à Mulhouse. On pourrait penser que c'est une plaie, et, sans aller jusque-là par respect pour les Mulhousiens, c'est, sans aucun doute possible, bien trop long. Cependant, à coups d'agrandissements et de zooms successifs sur Google Maps, j'ai découvert que Mulhouse se trouvait près de la frontière suisse, particulièrement de Bâle, avec laquelle elle partage son aéroport international, le fameux aéroport international de Bâle-Mulhouse-Fribourg. Le nom laisse d'ailleurs penser que, dans le coin, on trouve aussi Fribourg, donc qu'on n'est pas loin de l'Allemagne, mais bon, en Allemagne, on parle allemand et, en plus, j'ai été en Allemagne en voyage scolaire en quatrième, alors je connais déjà. D'aucuns pourraient me dire que Cologne et Bonn, c'est pas Fribourg, tout comme Toulouse n'est pas Amiens, mais je n'ai jamais été à Toulouse ni à Amiens, alors je ne peux pas juger de la pertinence de cette remarque. Et puis, surtout, d'un coup, l'évidence m'a frappé: l'Allemagne, c'est joli, mais la Suisse, ce serait tellement exotique!
Oui, j'irais à Bâle, rien que pour pouvoir évoquer, un jour, un périple hors de l'Union européenne!
Pour tout dire, ça a marché dès le jour même, quand, alors que ma mère me demandait si je passais déjeuner le lendemain, j'ai répondu que je n'étais même pas dans l'Union européenne et que ça serait un peu compliqué pour moi. Après que je lui avais précisé que j'avais vu, sur le marché, des asperges à 10 francs la livre, afin de l'aiguiller sur ma destination de globe-trotter nouvellement doté d'un passeport (depuis deux ans, quand même...), elle commençait déjà à s'interroger sur les pays d'Afrique où j'aurais pu me rendre, ce qui tend à prouver que, même au bout de 34 ans, ma mère ne me connait pas si bien que ça.
Ce qui nous amène à un point important: 10 francs pour 500 grammes d'asperge, c'est cher.
L'entrée du musée des Beaux-Arts qui propose des tableaux de Holbein le Jeune à 18 francs, c'est cher.
Une brasserie qui propose des burgers à 31 francs, c'est cher.

Le Menu Signature du McDo qui monte jusqu'à 18 francs, c'est pas non plus vraiment bon marché. Alors, certes, ils ont des apple pie (à 2 francs, ça va), mais c'est pas très très bon. Et des fun fries, fun parce qu'elles ont plein de trucs dessus, à 5 francs qui sont jolies sur la photo, mais pour moi qui ne mange pas de fromage, ça ne PEUT pas justifier le voyage.
Mais en économisant le temps compté pour manger et visiter les musées (ou chercher à acheter du chocolat, pour le principe, puisque, de toute façon, il fait 25 degrés et qu'on n'a pas de sac), on peut flâner, en suivant la carte, pour se retrouver sans trop comprendre comment, du coin haut à gauche au coin bas à droite du plan, passant de cathédrales en portes médiévales, jusqu'à la moche tour Roche, la plus haute de Suisse d'après la fille qui faisait visiter la ville à un ami intéressé et qui se trouvait au bord du Rhin en même temps que moi. On monte des escaliers, on descend des rues pentues (ou l'inverse), on croise des joueurs de boules le long des derniers remparts médiévaux et des naturistes sur les berges en face, on passe exactement sous un énorme trou (une idée architecturale forcément inévitable, à Bâle) dans une galerie marchande moderne, on se rappelle qu'on n'est pas loin de Mulhouse devant l'Hôtel de Ville hyper-coloré et pourtant, malgré ça, les vendeurs de glace ne parlent que l'allemand, comme tous les cartels explicatifs disséminés dans la vieille ville, auxquels, forcément, on ne comprend rien parce qu'on n'a jamais pu entretenir son allemand LV2 devant des visionnages répétés en VO de Ma vie à moi, Ils ne pensent qu'à ça! ou Un prof pas comme les autres... Et puis on repart, un peu fatigué après environ cinquante kilomètres de marche (parce que oui, vous vous en doutez, le tram, c'est cher) et un peu affamé, en achetant un ticket dans le coin le plus minable de la gare, sur une borne TER perdue au milieu des travaux et des quais isolés, comme si les Suisses voulaient rappeler le contraste qui existe entre eux et la France. Un peu déçu aussi, parce que bon, hé, on peut sortir et entrer comme ça de l'espace Schengen?! à quoi ça servait que j'aie un passeport?!!

Céline Dion - Ashes (BOF Deadpool 2) (2018)

À part ça, à Bâle, aucune allusion à l'Eurovision. Ou alors tout était en allemand et je n'ai pas saisi. Pourtant, on était en pleine période de célébration de la dernière victoire du pays à l'Eurovision grâce à l'enfant du pays Céline Dion (par une possible cousine au troisième degré de la fille de son régisseur, qui s'était peut-être marié avec une Française ayant eu des aïeuls suisses au XVIIIe siècle). C'était le 30 avril 1988 et c'est, avec Ne partez pas sans moi, la dernière fois qu'une chanson en français a remporté le Concours.

ZiBBZ - Stones (Suisse)

Mikolas Josef - Lie To Me (Eurovision version) (République tchèque)

Eleni Foureira - Fuego (Chypre)

Laura Rizzotto - Funny Girl (Lettonie)

Christabelle - Taboo (Malte)

C'est que les clips du jour sont jolis, dites donc.
  • Chypre, 2 points: fichtre, la dame a beaucoup beaucoup de maquillage, il ne faudra pas diriger les méga-ventilateurs vers son visage, ça pourrait être dangereux. À part ça, j'ai l'impression que la chanson se répète pendant trois minutes, sans être vraiment palpitante. Je trouve les ayéayéayé assez agaçants et les fuego pas très musicaux.
  • Lettonie, 3 points: c'est rigolo, de s'appeler Laura Rizzotto. Visiblement, on a dû beaucoup se moquer et voilà comment ça finit, la dame vient parler de sa dépression à l'Eurovision. Je trouve ça assez intrigant, mais ça a un peu de mal à m'intéresser jusqu'au bout des trois minutes. C'est peut-être ce trip cartes à jouer, ça avait pourtant perdu l'Estonien Jüri Pootsmann, naguère. Si elle réussit son final particulièrement abrupt, elle peut espérer marquer un peu le téléspectateur...
  • Malte, 3 points: là aussi, c'est intrigant et là aussi, j'ai un peu de mal à être intéressé jusqu'au bout. Et surtout, dépouillé de la mise en scène léchée du clip, je ne suis pas convaincu que le titre ait un potentiel assez fort pour attirer l'attention. Thomas G:son a été plus inspiré.
  • Suisse, 5 points: j'ai cru que ce serait un truc un peu rock dark, mais en fait, une fois que la chanson commence, ça ressemble à de la pop assez classique, avec sa montée progressive et l'explosion finale. J'aime bien les ahumm des chœurs, mais ça ne rend pas pour autant la chanson mémorable.
  • République tchèque, 6 points: j'ai commencé en trouvant hyper actuel, coloré, dynamique, avec de la trompette et un garçon pas désagréable à regarder derrière ses lunettes de soleil (j'ai tout de même vérifié son âge avant d'écrire cette phrase, mais 22 ans, ça vaaaa). Puis au bout de deux minutes, quand le chameau apparaît, je me suis souvenu que, dans la vraie vie, les chansons de Justin Timberlake m'ennuient et c'est un peu pareil pour Mikolas Josef. C'est bien fait, il est bien mignon, mais bon, la trompette, ça va bien deux minutes. N'empêche que la République tchèque n'a jamais envoyé une chanson aussi efficace à l'Eurovision!

Commentaires

Nataka a dit…
On peut sortir et entrer comme on veut e l'espace Schengen si c'est pour aller ou venir d'un pays qui a des accords spécifiques avec l'UE, mais c'est toujours bien d'avoir un passeport, surtout quand ta carte d'identité n'est plus valide mais que l'Etat Français par mesure d'économie décide qu'en fait si elle est encore valide pour 5 ans mais que dans les autres pays, non elle n'est plus valide, Madame, c'est écrit dessus.
Et ça me fait penser qu'il faudra que je voie Deadpool 2, tiens.
Suisse : Evidemment sur scène ça ne démarrera pas comme ça, avec les gros blancs, si ? Alors, c'est pas mal foutu, mais les refrains ont beau envoyer du son, encore une fois c'est une chanson qui "sonne l'impression" d'avoir de l'énergie, mais si on regarde de plus près pas tant que ça. Je demande de la mise en scène un peu péchue à costumes et choré, parce que si c'est juste le groupe de rock accrochés à leurs micros ça va être planplan.
République Tchèque : Ouaip il me plait vraiment bien ce petit gars, c'est complètement timberlakien mais on n'a pas trop de ça dans le concours, et c'est ce que le pays a envoyé de mieux, de plus crédible en tout cas, je pense, depuis que la RT participe.
Chypre : la mélodie au début me rappelle la chanson de Poli Genova il y a deux ans. Sinon, puisqu'elle a le feu, j'imagine que sur scène ça va miser sur le physique, et des fois ça marche. C'est un peu dansant, dans un style sirtaki-dance, faut voir, je ne rejette pas.
Lettonie : La gestuelle est clairement de trop, sinon j'aime bien, il y a des choses intéressantes dans la mélodie, ça a des accents de Neneh Cherry, un peu non ? Mais ça va se fondre dans la masse.
Malte : C'est intéressant ce concept d'eurodance à message. Mais j'ai beau m'intéresser au message, ça reste de l'eurodance, et pas assez puissante, avec ça, pour se faire entendre.

Pierre a dit…
Moi, par exemple, ma carte d'identité, elle a 24 ans. Elle est encore valable en Suisse, du coup, tu crois, si on me demande même pas mon passeport?

Le clip suisse dure presque 4 minutes, j'en déduis que les blancs du début ne seront pas là en vrai. De toute façon, il n'y aurait pas eu le silence complet (mais c'est dommage, parce que je pense que ça apporte pas mal à la mise en place du titre).
Je précise au passage que, dans chaque sélection, il y a un des pays qui est parmi les favoris (voire les méga-favoris) des bookmakers et des eurofans. Je n'ai pas besoin de dire de qui il s'agit ici, je pense (mais ledit favori s'est blessé aux répétitions en faisant une pirouette et sa cote a baissé).
Nataka a dit…
Ah ben mince ! C'est ballot ça. S'il ne danse pas ça va être moins bien la semaine prochaine.
Pierre a dit…
Il y a danser et faire des acrobaties. Si jamais il n'était pas complètement rétabli pour son salto arrière (je n'ai vu que ça pour le blesser potentiellement, dans le clip), il peut encore bouger comme pendant le reste du clip, quand il a sa posture de BG qui se la pète.
Nataka a dit…
La posture de BG qui se la pète ça me va bien. Mais c'est dommage pour lui.
Rhum Raisin a dit…
Mon classement du jour :
5 - Chypre : non seulement la dame n'a rien inventé, mais en plus, elle n'a pas l'air très sympa. Trop d'artifices.
4 - Malte : en voyant le titre, je me suis dit que ça faisait très longtemps que je n'avais pas joué à Taboo. Du coup, pendant les 3/4 de la chanson, j'ai essayé de me remémorer mes expériences d'enfant à jouer à Taboo. Et du coup, la chanson est passée vite, sans que j'aie pu prendre le temps d'y porter de l'intérêt.
3 - Suisse : en effet, les ahumm sont plutôt cool, mais cette chanson me fait penser à d'autres. On se laisse prendre, même si ça ne casse pas trop pattes à un canard. Je ne sais pas ce que j'ai à citer des vieilles expressions animalières.
2 - Lettonie : c'est vrai qu'il y a des accents de Neneh Cherry, et aussi un peu du style d'Alicia Keys dans la mélodie. C'est plutôt bien, et notamment cette fin sobre et élégante.
1 - République Tchèque : je vous rejoins complètement sur les influences timberlakiennes de ce jeune chanteur. J'aime beaucoup le pré-refrain rappé.

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