Mozart, et caetera

Depuis toutes ces années que nous nous connaissons, je n'ai encore jamais parlé de mon goût pour Mozart... Pas une journée sans que j'écoute l'une ou l'autre de ses œuvres, sans distinction, de La Flûte enchantée aux Noces de Figaro, en passant par L'enlèvement au sérail, son requiem ou ses Quatre saisons. Surtout les Quatre saisons, d'ailleurs. Touboudouboudoum touboudouboudoum touboudoubou touboudoubou touboutouboudoum toum-toum-toum-toum-toum-toum-toum-toum-toum-toum-toum toum toum, c'est si beau. Et puis Tatoue-moi, aussi!
Quelle ne fut pas ma déception, en entendant enfin ce dernier morceau en live, au concert donné par Mozart and Friends au Palais des Sports de Paris, constatant que la scénographie choisie affadissait terriblement ce morceau pourtant terriblement efficace en single. Il faut dire, aussi, que Mozart n'est pas terriblement charismatique et a du mal à habiter vraiment la scène. Il ne fait que sautiller, toujours de la même manière, en terminant toujours par la même révérence et, de temps en temps, telle Mylène Farmer les jours de fête, il crie «Wahouuu!». Sinon, il ne donne clairement pas l'impression de savoir quoi faire de son corps... En plus, on n'imagine pas, en lisant sa bio, que Wolfgang Mozart (le W se lit comme dans Waterloo, pas comme dans wagon) puisse avoir un accent italien si marqué. Il n'est pas impossible que ce soit une des raisons qui laisse croire que Wolfgang n'est pas très bon comédien entre les chansons.

À sa décharge, Mozart n'a aucune doublure et passe donc, en deux heures de temps, de 20 à 35 ans, jusqu'à jouer sa propre mort (parce que, oui, il semble que Mozart soit mort). Ce n'est donc pas trop grave, si on ne comprend pas tout, puisque, de toute façon, l'histoire va beaucoup beaucoup trop vite. Et c'est une des raisons qui font que Tatoue-moi est gâchée: en cinq minutes chrono, Monsieur va à Paris pour trouver la gloire, y chante Tatoue-moi en distribuant ses partitions comme des tracts aux gens qui passent et qui s'en moquent, voit sa mère mourir et se dit qu'il devrait rentrer au pays pour retrouver sa muse, Aloysia Weber, qui l'a déjà oublié. En voulant survoler toute la vie adulte de Mozart, sans jamais la moindre précision chronologique, tout n'est finalement qu'effleuré, sans que tout paraisse très logique.

Il faut dire, aussi, que, pire encore que l'accent italien de Wolfgang, le spectateur doit tenter de déchiffrer les paroles des chansons qui sont proposées. Ah çà, ça valait bien le coup de se la jouer opéra-rock qui ose le presque-grunge en mettant dans ses chansons des mots comme «crever» ou «gueule» pour dire non au gnan-gnan! On ne comprend RIEN! Dès la première chanson, la musique (en live, au moins la plupart du temps) est trop forte pour distinguer ce que peut bien dire Papa Mozart, qui articule pourtant exagérément, et le résultat tend à la bouillie sonore dès que plusieurs personnes chantent en même temps, quand les instruments jouent encore plus fort pour se faire entendre. Du coup, entre les gesticulations de Wolfi, la musique trop forte, l'action qui passe trop vite et les gags qui tombent à plat, et malgré la présence d'Aloysia (Melissa Mars) le premier acte est particulièrement déconcertant, d'autant qu'il a l'audace de s'achever sur Je dors sur des roses, loin d'être la chanson la plus enthousiasmante du spectacle.

Heureusement, le deuxième acte est nettement meilleur. Est-ce l'odeur de l'encens qui finit par agir sur le public, mais, d'un coup, Mozart n'est plus insupportable et les nouveaux personnages du récit sont drôles. C'est aussi peu original qu'une pièce de boulevard d'il y a trente ans, mais c'est efficace, en grande partie grâce au comte Rosenberg, chargé de dynamiter un peu la routine installée, en s'adressant directement au public. Le deuxième acte a aussi l'avantage de proposer du vrai Mozart (pas trop non plus, il ne faut pas pousser!) et enchaîne les chansons rythmées, jusqu'au fabuleux Bien qui fait mal, l'un des plus beaux tableaux du show, qui révèle le talent scénique de Salieri, réellement parfait malgré sa coiffure. L'euphorie est de courte durée, parce que, là encore, le temps s'accélère et que la mort de Mozart s'annonce en arrivant comme un cheveu sur la soupe, mais la conclusion s'avère néanmoins franchement plaisante. Si la scénographie de L'assasymphonie est relativement décevante (mais laisse Salieri montrer qu'il se débrouille mieux sur scène que son rival), Victime de ma victoire réveille le public, surtout celui au milieu de la salle et le final sur Vivre à en crever est plutôt convaincant, même si une grande partie du public, alors, n'écoute plus, puisqu'elle s'est précipitée au pied de la scène pour voir de plus près et d'un coup Mozart et Salieri.

Le bien qui fait mal
via Vimeo.

Enfin, quand le spectacle se termine, il laisse surtout un peu de déception et l'envie d'écouter le disque pour pouvoir vraiment juger des chansons. Pas de quoi être vraiment emballé, en tout cas. Et, clairement, quand les applaudissements d'une salle s'arrêtent juste à la fermeture du rideau après le rappel, que le public met plus d'une minute à se lever pendant les applaudissements et que personne dans la salle ne semble vraiment avoir à cœur de reprendre Tatoue-moi avec toute la troupe, hormis les groupies des premiers rangs qui en profitent aussi pour toucher la robe de Melissa Mars, c'est que la salle n'est pas vraiment emballée.

Commentaires

Funben a dit…
Excellente chronique qui vient de me faire économiser une mauvaise soirée au palais des sports. merci.
Anonyme a dit…
Rien ne vaut leur passage télé à l'émission d'ELA où ils reprenaient "Tatoue-moi sur tes seiiiins" pour des gosses de 9 ans venus les voir dans leurs loges. Les pauvre mioches n'avaient jamais dû réfléchir au sens des paroles avant cet instant mémorable.

Sinon je ne mettrais pas ma main au feu que Mozart soit l'auteur des "4 saisons", mais c'était pour tester ton lectorat, I guess :)

E,
Pierre a dit…
Ce qui reste un peu mystérieux pour moi, c'est ce que peuvent être lesdits seins, puisque la chanson s'adresse à Paris, la ville, et qu'il la chante sans y mettre aucun sous-entendu, ou alors il est très sous-entendu.
cecilette a dit…
Ah, j'ai toujours dit Wolfgand comme wagon moi... :$
Pierre a dit…
Comme tout le monde, cecilette, si ça peut te rassurer. Heureusement, finalement, que Mickelangelo Loconte était là pour révéler la vérité après tout ce temps!

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