Plush story

Parfois, je me sens seul. Parfois, j'ai l'impression de ne pas être à ma place...
Il suffisait de regarder les gens dans la salle de Winnie l'Ourson pour en être convaincu! Certes, j'aurais pu remplacer Winnie l'Ourson par Titeuf le film 3D ou Rio 3D, mais pas tout à fait... Après tout, j'ai l'habitude de me retrouver dans des salles avec des centres aérés, des collégiens qui goûtent leurs premières sorties indépendantes, des familles avec Papa ou Maman, le petit frère et la grande sœur... Mais pour Winnie l'Ourson, moi, le grand dadais de vingt-sept ans, je me sentais un peu seul, au milieu des mères de famille qui amenaient là leur cher bambin de trois ans, pas beaucoup plus, sans doute pour leur première sortie au cinéma.

Oh, que c'est mignon, quand, alors que Mickey commence à siffloter pour annoncer le début du film, mon voisin Arthur (ou Aaron, peut-être) s'écrie «c'est pas Mickey qu'on veut, c'est Woody».
«Winnie, chéri», précise sa mère.
Qui lui demande aussitôt pourquoi il s'est levé pour se coller au fauteuil devant lui, au lieu de rester bien assis. Qui lui demande de revenir s'asseoir. Viens t'asseoir, Arthur (ou Aaron, peut-être)!
Oui, bordel, Arthur (ou Aaron, peut-être), va t'asseoir et chut!
Merci bien, Arthur (ou Aaron, peut-être).

Mais je serais de mauvaise foi si je réduisais ma séance de Winnie l'Ourson à ce seul incident. Parce que, en fait, comparé à mon voisin qui a obligé son père à l'accompagner aux toilettes pendant le générique début de Rio 3D (étant entendu qu'un enfant ne sait évidemment pas qu'il aura forcément envie de pisser si on lui dit qu'il va devoir rester assis pendant une heure trente), à ce père qui doutait visiblement des capacités intellectuelles de son cher rejeton en lui expliquant ce qu'on voyait à l'écran (comme si ce n'était pas clair que la caisse échouée dans la neige était tombée du camion à cause de son freinage trop brusque au feu rouge!), à cette petite fille qui répétait à ses parents, sur un ton amusé, les gros mots de Titeuf dans Titeuf le film 3D, en les traduisant parfois de façon un peu aléatoire (non, très chère, «espèce de zizi sexuel», ça ne veut pas dire «amoureux»), ces spectateurs de Winnie l'Ourson ont été très calmes. Très trèèèès calmes.
En fait, je me demande même s'ils ont compris.

Je marque une pause et dévoile un pan de ma vie.
Le jour où j'ai compris que, en fait, Winnie l'ourson, le cochon Porcinet, Coco Lapin et les autres ne vivaient des aventures que dans l'imaginaire de Jean-Christophe et que, en réalité, ce n'étaient que des peluches, j'étais très fier de moi. Je me souviens même en avoir parlé à ma mère, qui, reconnaissons-le, n'en avait rien à secouer.
Oui, vous avez le droit de penser que c'est une mère indigne et qu'elle pourrait s'émerveiller devant l'intelligence de son fils préféré.
En même temps, j'avais plus de vingt ans, elle n'avait plus de raison de s'émerveiller devant l'intelligence de son fils préféré...

Ce nouveau Winnie l'Ourson est beaucoup plus clair que tout ce qui a précédé. Si Les aventures de Tigrou... et de Winnie l'Ourson, Les Aventures de Porcinet ou Winnie l'Ourson et l'éfélant se présentaient complètement sous la forme de dessins animés avec une intrigue complète, on apercevait la peluche de Winnie en ouverture des Aventures de Winnie l'Ourson, l'original. Et ici, le narrateur est très explicite sur ce fait. Ce qui permet d'offrir un merveilleux générique de fin, où les scènes-clé du film sont rejouées avec les vraies marionnettes et quelques objets farfelus qui peuplent la chambre de Jean-Christophe, un vrai collectionneur de tout.
La volonté du retour aux origines est très nette: comme en 1977, cette aventure de Winnie s'appuie sur le livre. Mais là où Les Aventures de Winnie l'Ourson regroupait trois courts-métrages liés de façon assez artificielle, ce nouveau film n'en est qu'une seule, mélangeant des envies de miel de Winnie et la recherche de la queue de Bourriquet, portée disparue pour la 2341e fois, entre les dessins animés, la série avec des gens dans des peluches ou les films.
Et, surtout, un drame: Jean-Christophe a disparu.

Autour de cette intrigue classique, au gré des pages du livre dans lequel Winnie se déplace, parle avec le narrateur, s'emmêle les pieds dans les paragraphes, c'est ainsi l'occasion de placer une opération commando menée de main de maître par Coco Lapin et une excellente scène de trou dont il faut sortir, avec un humour qui touche au burlesque.
C'est un fait, j'ai eu l'impression d'être celui qui m'amusait le plus dans la salle.
Et tant pis si la traduction française, à vouloir faire trop propre, dénature le texte original, en osant traduire tael par queue (au lieu de keue, il va de soi) et si le dernier rebondissement du film est en contradiction avec l'argument même du film. Tant pis aussi si le texte du livre apparaît en anglais, même lorsqu'il se mêle à l'intrigue principale. Ça donnera l'occasion à mes co-spectateurs de découvrir des tas de choses dans ce film au fur et à mesure qu'ils le reverront et qu'ils n'auront forcément pas comprises à 3 ans.
Quant à moi, si j'ai beaucoup aimé Titeuf le film 3D et bien aimé Rio 3D, c'est nettement Winnie l'Ourson que j'ai préféré.

Commentaires

Nataka a dit…
Winnie et ses amis seraient des animaux en peluche ? OH MON DIEU ! Tu viens de briser toutes mes illusions.
C'est un genre de Toy Story avant l'heure, en somme.
J'ai beaucoup de rattrapage à faire en matière de Winnie l'ourson, je crois.
Pierre a dit…
Je précise que Jean-Christophe n'est absolument pas un animal en peluche. C'est un enfant.
(et s'il te prend l'envie de rattraper Winnie, commence par celui-ci!)
Nataka a dit…
Pfff... mais je le sais, que Jean-Christophe est un vrai petit garçon.
Comme Pinocchio.

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