Chacun fait (fait fait) c'qui lui plaît (plaît plaît)


Malgré les années qui passent, je manque encore terriblement de volonté et de personnalité. Mais comme, par ailleurs, je manque énormément d'audace et d'esprit d'initiative, c'est aussi grâce à ça que je me retrouve dans des situations que je n'ai pas nécessairement choisies. Par exemple, cette semaine, quand ce jeune homme charmant est venu sonner à ma porte...
Non, pardon, c'est un mauvais exemple...

Je vais plutôt évoquer le cas de cette après-midi. Je rentrais tranquillement du Domaine, sans marcher trop vite pour ne pas réveiller les courbatures que je subissais depuis quelques jours comme si j'avais fait du cheval, alors que je jure mes Grands Dieux que ça ne m'est absolument jamais arrivé. Une moto se pose alors sur le trottoir, avec dessus Monsieur Musique, qui se rendait justement à la Maison des Arts et de la Culture située exactement de l'autre côté du trottoir, où les élèves de sa chorale, ainsi que plein d'autres élèves de pleins d'autres chorales de l'académie, se produisaient ce soir. J'avais déjà eu vent de ce spectacle, par Monsieur Musique qui venait d'apprendre que j'habitais justement en face de ladite MAC, mais j'avais oublié la date, parce que j'avais bêtement oublié de la mentionner dans mon agenda Titeuf, qui me sert essentiellement à noter les dates de mes contrôles, quand j'y pense, et surtout, comme tous les agendas Titeuf, à bien mettre en valeur les dates des vacances.

Quoiqu'il en soit, quand Monsieur Musique a posé la question pour savoir si je venais, comment aurais-je seulement pu dire que non, merci, mais j'ai d'autres choses à faire? Enfin, j'aurais pu, éventuellement, si j'avais eu d'autres choses à faire, mais comme ce n'était pas le cas, il m'aurait fallu mentir, ce qui me met forcément mal à l'aise. Alors j'ai répondu que, justement, il n'y avait rien à la télé et que je ne savais pas quoi faire, me privant par là-même de la seule occasion de voir la pièce d'Ève Angéli sur France 4, et Monsieur Musique, ravi, m'a donné une place gratuite, ayant bien compris que je ne paierais quand même pas 5 euros pour voir des élèves qui ne sont même pas les miens ou si peu. Il a quand même attendu que j'aie le billet en main pour me présenter le programme, composé de trente minutes avec du Haendel et du Mendelssohn, puis d'une heure avec dix tableaux sur la vie de Cézanne...

Et il faut bien admettre que je n'aurais peut-être été de moi-même assister à un spectacle commençant par Verleih uns Frieden puis Hör mein Bitten, d'autant que, même si mes oreilles ne sont pas habituées à la musique classique (même celle d'André Rieu et de Roberto Alagna), je ne suis pas certain que l'ensemble ait été parfaitement exécuté par l'orchestre, et j'aurais tendance à être conforté dans cette idée par ce curieux interlude où un Monsieur est venu des coulisses pour faire jouer les instruments les uns après les autres et faire parfois des grimaces significatives. Mais croyez bien que ç'aurait été un tort, parce que, d'abord, c'était là l'occasion inespérée de revenir dans cette MAC juste en face de chez moi où je n'ai pourtant plus été depuis ma cinquième, elle qui accueillera la saison prochaine des artistes aussi divers que Anaïs, Florence Foresti et, comme tous les ans, Blanca Li. De visiter une salle de spectacle avec des escaliers vertigineux et de constater que mes applaudissements sont désespérément muets puisque je ne les entends pas moi-même alors que je vois très bien mes mains se taper l'une l'autre. Enfin, en cherchant un moyen d'échapper à ce spectacle, je n'aurais jamais découvert que ma ville abritait un sosie approximatif et néanmoins de qualité de Ryan Kwanten période Summerland (ou de n'importe quel surfeur typique de série américaine, en fait).

D'autant que, passée la première partie, qui durait finalement une grosse demi-heure mais s'achevait par un tube, Hallelujah extrait du Messie, la fresque consacrée à C É Z A, C É Z A N N E était intéressante. Elle avait déjà la bonne idée de commencer par un gitan joueur de flûtiau qui débarquait du fond de la scène, tels les Musclés en 1996, de quoi briser la monotonie et intéresser même les membres du public les plus réticents (y compris Ryan, qui s'était visiblement aussi retrouvé là parce qu'il était piégé), jusqu'à ce que le morceau de flûtiau ne s'avère durer plus de cinq minutes, ce qui est fort long.

Et, voyez-vous, mis à part le fait que Cézanne peint, je ne savais pas grand chose de lui. J'aurais pu faire illusion en évoquant des joueurs de cartes voire des fruits sur une table, comme on en voyait sur les anciens billets de 100 francs orange, mais j'ignorais complètement que son œuvre ne connut, son œuvre ne connut qu'une gloire posthu, son œuvre ne connut qu'une gloire posthume. C'est dire comme ma soirée est loin d'avoir été perdue. C'est à peu près tout ce que j'ai retenu, à peu près tout ce que j'ai compris des paroles chantées en fait (avec ses dates et son lien avec Zola, raconté par Paulo lui-même qui se promenait dans la salle), et il a fallu pour cela que je regarde une heure d'enfants qui chantent en chœur, mais c'était nécessaire. Il y avait un garçon en jaune qui jouait sa vie, ce pauvre tambour qui avait perdu une soirée pour taper trois fois dessus, ou encore un évanouissement au milieu d'une chanson, que j'ai malheureusement raté -je n'ai vu que les voisins commencer à paniquer en continuant de chanter, sans oser demander à ma voisine de devant de rembobiner légèrement son enregistrement pour voir. Enfin, privé de toute fierté de voir là l'un de mes enfants (car non, mes élèves ne sont pas comme mes enfants, finalement), j'ai compris combien ma mère avait du mérite, elle qui a dû subir par ma faute trois spectacles de ce genre (même si, de mon temps, je chantais des vraies chansons, comme Les Acadiens, La complainte de Marie-Madeleine, Quand la musique est bonne, Les Champs-Élysées ou Allez la vie! en espérant apparaître au moins une fois sur la vidéo).
Alors, ça valait bien de rater Ève Angéli...

Commentaires

Rhum Raisin a dit…
J'ai cru un instant que tu allais narrer ton voyage gratuit, en moto, assis derrière Monsieur Musique, mais non.
Je pense effectivement que ta soirée fut , sans nul doute, bien meilleure que si elle avait consisté à rester devant France 4, à écouter (et voir) Eve Angeli (mal) jouer. Tu as au moins réalisé que ta mère avait une patience hors du commun pour être venue t'applaudir à trois reprises, avant. Je me souviens que la mienne n'est jamais venue (ou alors une seule fois) lors de mes spectacles scolaires de fin d'année. Bon, en général, c'est moi qui la dissuadais, mais c'est une autre histoire.
Et sinon, depuis quand "La complainte de Marie-Madeleine" et "Allez la vie!" (chansons dont je me souviens très bien n'avoir aucun souvenir) sont des "vraies chansons"?
Pierre a dit…
Allez la vie était une vraie chanson à l'époque, parce qu'elle servait de titre à une compilation ou un live d'Isabelle Aubret dont la publicité passait souvent à la télé alors. Du coup, La complainte de Marie-Madeleine était noyée dans le lot des vraies chansons et j'ai donc bêtement cru que c'était une vraie chanson...Même si je ne l'ai plus entendue depuis, ce qui arrive parfois. Je dois avouer que, en cherchant hier à vérifier le titre, j'ai compris que je vivais dans l'erreur depuis près de quinze ans. Mais, en la réentendant, sur Myspace, je trouve toujours que j'aime cette chanson.
Jeanne ou Serge a dit…
Si j 'avais su que tu étais un chanteur passionné plus jeune, j'aurais insisté pour que tu te lances dans le ridicule du karaoké-devant-tous-les-collègues aux fêtes du collège!
cecilette a dit…
Je ne savais pas que le billet de 100FF était une représentation de Cézanne !
Mais je crois que je préfère(rai) l'histoire du jeune homme charmant venu sonner à ta porte !

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